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À l’écoute du monde non-humain, ou de l’art du pistage

Professeur·es : Rachel Rajalu, Rodolphe Alexis et Miguel Mazeri
Spécialité du cours : Photographie, Installation, Volume
Workshop
Activité obligatoire
Semestres 3 à 8
Calendrier : du 17 au 20 novembre 2020


OBJECTIFS
Il s’agira dans ce workshop de pratiquer et d’interroger l’écoute sortie de ses usages ordinaires, de se positionner face à la multiplicité des mondes sensoriels révélés par des entités non-humaines (un bâtiment, un rocher, un brin d’herbe, un oiseau, un animal de compagnie, une rivière, etc.), et d’en proposer des traces et des interactions, enregistrées, imitées, transformées qui seront activées lors d’une performance radiophonique, afin de comprendre les enjeux éthiques, politiques et esthétiques liés à ces trois activités (écouter, prendre, créer/diffuser). Par ces expériences pratiques et théoriques, l’ambition est d’évaluer les impacts de ces attentions au monde non-humain sur nos formes de vie et sur notre capacité à élargir notre sens du commun.

Étendre nos capacités d’écoute permet de renforcer ce que le philosophe Hartmunt Rosa appelle notre « atteignabilité », c’est-à-dire notre capacité à être atteint, touché par une perception au travers de laquelle nous entrons en contact et en résonance avec le monde. Ce workshop invite à éprouver nos milieux de vie par ses sonorités, et dans cette épreuve à mieux y apprécier nos relations et / avec les êtres qui les composent. La plupart du temps, nos formes d’attention sont le résultat d’une sélection et d’un tri des sons qui nous entourent dans l’objectif de se fixer que sur ceux qui rendront nos activités plus efficaces. Ces opérations de sélection impliquent une grande négligence à l’égard d’autres sonorités présentes (Yves Citton). Nous faisons l’hypothèse que le développement de nouvelles sensibilités et esthésies par l’art du pistage (Baptiste Morizot) de ce que nous n’avons pas pour habitude d’ouïr et d’entendre, contribue à fonder des relations d’intimité avec les êtres animés et inanimés du monde et, par là, à la prise de conscience de leur caractère irremplaçable (Cynthia Fleury) et indisponible (Hartmunt Rosa). Aller à la rencontre de, écouter et comprendre ce que ces êtres ont a nous (se) dire, pose des questions d’accueil, d’hospitalité, de cohabitation, de transformation des uns et des autres par la présence vigilante de tous. C’est enfin, en contexte anthropocène, décrypter et imaginer des possibles pour un monde meilleur et respectueux de la place que chacun y occupe.

La performance sera présente à deux niveaux : dans la démarche d’exploration et de prise de sons (c’est-à-dire sous forme d’enquête sonore d’un territoire, sur ses échelles liminales, et le caractère multiple des flux et usages qui en sont fait) ; dans la restitution sonore à un public (c’est-à-dire dans l’activation en directe d’une oeuvre collective réalisée à partir d’actions et de captations).

Ce workshop s’inscrit dans les activités de deux projets de recherche de l’Esad TALM Le Mans : « Hospitalité à l’ère de l’anthropocène : pour une approche sensible des territoires par le design » dirigé par Olivier Houix et Miguel Mazeri et « Tempêtes » – Axe « Performances, dépaysements et réparations » dirigé par Rachel Rajalu, en résonance avec le projet de recherche et création de Rodolphe Alexis « Habiter l’écoute, (audiographie sensible de la multitude) » d’un environnement amazonien, dans le cadre du soutien à un projet artistique du Centre national des arts plastiques.

CONTENU
Le workshop se déroulera en quatre étapes (3 jours) :

  • 1 demi-journée sera consacrée à la présentation du projet, à sa démarche, (il ne s’agira pas d’aller chercher des sons, mais bien en alternant marche et position statique de se laisser surprendre par ou de provoquer des sons jusqu’alors ignorés) et à ses enjeux éthiques, politiques, sociologiques et esthétiques ;
  • 1 demi-journée sera réservée à une formation sur le matériel et sa mise en oeuvre (hydrophone, parabole, microphones directionnels, miniatures, stéréophonie, capteurs solidiens, éléctromagnétiques et ultrasonores) et à des comparaisons d’approches de la prise de son (phonographie, audio-naturalisme, bioacoustique, paysage sonore, musique concrète), à des exercices d’interprétation et d’imitations, et d’écoutes situées ;
  • 1 journée de captation : approche silencieuse du territoire et collectes in-situ ;
  • 1 journée de mise en forme sonore ;
  • 1 soirée de diffusion à Radio-On en présence des participant·es.

En ouverture du workshop, les enseignant·es proposeront une conférence à deux/trois voix sur les enjeux du projet.

PRÉREQUIS
Curiosité pour les manifestations acoustiques du dehors, la création sonore au sens large, les musiques expérimentales et la poésie sonore, la prise de son, capacité à sortir de sa zone de confort pour aller à la rencontre de petites perceptions sonores

DÉROULÉ PÉDAGOGIQUE
Cet Arc annuel est axé autour d'une exposition qui se tient au second semestre et rassemble les travaux réalisés par les élèves.

ÉVALUATION
Qualité et rigueur de l’engagement dans les propositions des enseignants. Force de proposition et inventivité. Capacité à se défaire de ses habitudes d’écoute.